A Lyon, la partie débute avec La Fanciulla del West, dame de cœur d'un jeu gagnant
Copyright Jean-Louis Fernandez
Article by Elodie Martinez from Opera Online
Vendredi dernier marquait le lancement du festival de l’Opéra national de Lyon, placé sous le thème cette année de « Rebattre les cartes », qui s’ouvrait avec La Fille du Far West – hommage à Puccini oblige. L’oeuvre est donnée pour la première fois à Lyon, dans une nouvelle mise en scène signée par Tatjana Gürbaca.
Cette mise en scène s’avère relativement sobre, nous plongeant dans un Western atemporelle, à la fois passé et présent, grâce au décor de Marc Weeger, aux costumes de Dinah Ehm et aux lumières de Stefan Bolliger qui offrent un bel effet sépia au lever de rideau, nous plongeant dans le grand ouest américain par la magie de l’éclairage.
Sur la scène, une sorte de bar est surélevé, sur différents niveaux, et un immense lustre deviendra plus tard la cabane de Minnie. Aucun élément n’est trop marqué, et pourtant, tout existe et coexiste. Au fond, la toile dépeint cet horizon vers lequel le couple partira finalement. Si c’est par un départ et un nouveau commencement que tout finit, c’est aussi par une ouverture que se ferme le fond de scène. En tournant ou déplaçant quelques éléments, le décor devient un autre lieu, sans marque précise. Au dernier acte, tout est finalement brisé, laissant présager que la fin approche et que sans Minnie, rien ne tient debout. Ce n’est toutefois là qu’une hypothèse car il faut admettre que l’idée ne trouve pas d’explication dans le livret, ni même sur scène. On doute que les quelques jours passés soient à l’origine d’un tel délabrement. Ce qui ne laisse aucun doute en revanche, c’est l’efficacité de la direction d’acteurs, fort bien maîtrisée.
En ne se laissant pas aller aux clichés faciles, tout en n’omettant pas les idées reçues que le public aura à l’évocation du Far West, Tatjana Gürbaca réussit le pari d’une mise en scène entièrement au service de l’œuvre, discrète mais présente, efficace sans vouloir être la star de la soirée. Et on l’en remercie pour cela, même si, selon les goûts de chacun, l’ensemble peut manquer de fantaisie pour qui voudrait une interprétation hollywoodienne.
Car la véritable star à l’opéra reste la musique. Une musique loin de La Bohème, Tosca, ou autre Turandot et même Madame Butterfly. La Fanciulla del West apparaît un peu à part dans l’œuvre de Puccini. Peut-être est-ce pour cela qu’elle est moins donnée que les autres citées. Pourtant, la musique est forte ici, et magnifiquement défendue par l’Orchestre de l’Opéra de Lyon sous la direction de son chef Daniele Rustioni. Certes, en début de soirée, quelques cordes pincées ajoutent un effet presque métallique disproportionné, mais c’est là le seul léger défaut de toute la soirée. On n’en tient donc pas rigueur, d’autant plus que l’orchestre fait bien plus que simplement exécuter la partition. Le sépia de la scène est injecté dans la musique par le maestro qui dépeint la fresque puccinienne avec le talent qu’on lui connaît. La fougue musicale fait rugir l’orchestre, qui sait se montrer tendre et délicat. On demeure saisit dès l’introduction, et jusqu’à l’ultime note.